Observations et Propositions sur Projet de SDAGE 2016-2021 1/5
L'Association pour la Sauvegarde du Bassin de la Seiche et de son Patrimoine a présenté les observations et propositions suivantes.
1 – Nos observations relatives au projet de texte du SDAGE 2016-2021
Paragraphe 1B-1
Les moulins et leurs ouvrages ont un rôle régulateur des crues et permettent d'amortir les effets de ces crues.
Pourquoi envisager la suppression d'ouvrages existants alors qu'il est envisagé par ailleurs la réalisation de nouvelles digues ?
Paragraphe 1B-3
Les acteurs locaux des rivières (associations, collectifs…) doivent être associés par la CLE à la définition de la liste des ouvrages ou des travaux proposés .
En tout état de cause, la définition de cette liste, portant par nature grief, doit être dûment motivée et justifiée par des données techniques, scientifiques et juridiques vérifiées.
Paragraphe 1C
Comme mentionné sous ce point 1C, "il ne s'agit pas de chercher à restaurer un état naturel supposé antérieur à toutes activités humaines".
Il convient d'admettre que toute modification de l'hydromorphologie et des habitats qui serait susceptible d'être imputée aux ouvrages devrait l'être depuis leur construction, à savoir pour une grande partie d'entre eux, depuis plusieurs siècles.
Aussi, toute détérioration récente de l'hydromorphologie, telle que dénoncée, ne peut être principalement imputée qu'à des causes extérieures aux moulins.
Paragraphe 1C2
Les dysfonctionnements hydromorphologiques ne peuvent en aucun cas être imputés au seul taux d'étagement. A titre d'exemple, le taux d'étagement ne prend aucunement en compte l'existence des bras de contournement de nature à assurer la continuité écologique.
Paragraphe 1D
L’introduction du paragraphe 1D relève de la seule affirmation.
Un bras de contournement efficace en période de migration doit bien être assimilé à un "dispositif de franchissement efficace", être pris en compte "dans le calcul du taux de fractionnement" et permettre de considérer l'ouvrage correspondant "à hauteur de chute nulle".
Paragraphe 1D2
Comme pour bien d’autres rivières, le classement de la Seiche en liste 2, arrêtée par le Préfet Coordinateur de Bassin en date du 10 juillet 2012, ne repose sur aucun réel fondement technique et scientifique et n'a été arrêtée sans aucunement prendre en compte la réalité et la spécificité de chacun des ouvrages concernés (bras de contournement, hauteurs de chute, systèmes de vannage, etc.)
Ce classement mérite d’être réexaminé et abandonné par les services de l’Etat.
Paragraphe 1D3
La préférence manifeste du SDAGE pour une solution d'effacement total des ouvrages transversaux est totalement dogmatique, tant celle-ci est radicale sans la moindre recherche d’une solution plus adaptée et proportionnée.
Aussi, nous contestons fermement l'ordre de priorité retenu par le projet de SDAGE 2/5 pour les interventions sur les ouvrages.
Les différents aménagements des ouvrages qui seraient imposés ne doivent aucunement avoir pour effet une quelconque rupture d'égalité des citoyens devant la loi, et ce y compris les propriétaires d'ouvrages transversaux.
Toute proposition d'aménagement doit restée proportionnée à la problématique rencontrée.
Tout aménagement, tel des échancrures, doit être dûment justifié techniquement et scientifiquement et ne pas seulement répondre à l’obsession, trop souvent constatée et vérifiée, d'un abaissement généralisé des lignes d'eau qui n’a d’ailleurs aucun fondement juridique.
Avant la réalisation de tout aménagement des ouvrages, il doit être bien vérifié, au moyen d'une étude d'impact diligentée, en respectant le principe du contradictoire, le réel degré d'atteinte au principe de continuité écologique.
Aucun des aménagements proposés ne doit être de nature à compromettre le droit d'eau des propriétaires des ouvrages.
Doit être pris en compte le caractère saisonnier des migrations des espèces migratrices concernées dans nos régions, la continuité des espèces aquatiques n'ayant pas besoin d'être maintenue toute l'année et notamment en période d'étiage.
Doit être prise en compte la circulation des sédiments provoquée naturellement par les phénomènes de crues.
Doit être prise en compte en période de hautes eaux, la migration naturelle des espèces (brochets…)
Doivent être pris en compte, avant la réalisation de tout projet d'aménagement ou travaux sur les ouvrages hydrauliques, tous risques d'impact et de préjudice sur les ouvrages bâtis, notamment d'habitation (dessiccation, déstabilisation des ouvrages, dépréciation immobilière par modification de l'environnement…). A cet égard, il est vivement regretté qu'aucune réelle étude d'impact ne soit effectuée.
Toute proposition d'aménagement partiel, aussi flatteuse soit-elle dans sa formulation, ne doit pas présenter d’impact sur le niveau d'eau. Une telle proposition d'aménagement partiel ne doit aucunement être trompeuse, créer l'illusion et avoir en réalité des effets sur le niveau d'eau identiques à ceux d'une solution d'effacement total.
L’ analyse des problématiques et les mesures d’ aménagement doivent être faites ouvrage par ouvrage.
Paragraphe 1G
La critique de toute "vision purement hydraulique des cours d'eau" relève elle-même d'une vision dogmatique de l'histoire.
La gestion appelée "hydraulique" de nos cours d'eau date de nombreux siècles au cours desquels la qualité écologique et la richesse piscicole de nos rivières étaient incontestables.
Force est de constater que nos rivières, telles que prétendument façonnées par cette vision "purement hydraulique", font bien partie de notre patrimoine culturel et historique à sauvegarder
Chapitres 2, 3, 4, 5 3/5
D'une manière évidente, ce ne sont aucunement les ouvrages transversaux et moulins qui créent :
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les nitrates ;
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les pollutions organiques et bactériologiques ;
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les pesticides ;
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les substances dangereuses.
Ces différentes pollutions sont bien plus récentes que la construction de nos moulins.
Les moulins et ouvrages ne sont que les boucs émissaires d'une politique écologique qui manque de courage et qui devrait davantage s'attacher, conformément à la DCE de 2000, à traiter en priorité les pollutions et problèmes à la source.
Chapitre 8
Nous sommes en parfaite adéquation avec le titre "Préserver les zones humides", étant rappelé que le maintien des ouvrages existants participe de cette préservation des zones humides.
Paragraphe 9A
Toute qualification d'ouvrages ou complexes en ouvrages "infranchissables" doit être dûment justifiée au cas par cas sur la base d'éléments techniques et scientifiques.
Pour cette appréciation, doit être prise en compte l'existence , notamment, de tous bras de contournement et de ses modalités de fonctionnement effectif en période de migration.
Paragraphe 12B
Dans le souhait commun de politiques cohérentes, il importe que les Commissions Locales de l'Eau mettent en place des actions de concertation et de consultation auprès de l'ensemble des acteurs concernés par la politique locale de l'eau (associations, propriétaires de moulins, riverains…)
Paragraphe 14A
Comme précisé ci-dessus, il importe que les Commissions Locales de l'Eau mettent en place des actions de concertation et de consultation auprès de l'ensemble des acteurs concernés par la politique locale de l'eau (associations, propriétaires de moulins, riverains…)
2 - Autres observations :
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Comme l'a très justement souligné le Collectif des Moulins et Riverains du Morbihan, la continuité écologique n’occupe, au regard de la DCE 2000, qu’une place secondaire dans nos obligations de qualité de l’eau. Les paramètres à prendre en compte pour qualifier l’état écologique des eaux des rivières sont les paramètres chimiques et physico-chimiques. L’hydromorphologie n’apparait qu’en 3ème position et ne représente nullement la clé de la qualité de l’eau.
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Comme le souligne également très justement le Collectif des Moulins et Riverains du Morbihan, de nombreuses études scientifiques récentes révèlent le peu d'impact des seuils sur la faune piscicole.
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Etude des impacts de l'étagement des cours d'eau sur les peuplements piscicoles en Bretagne et en Pays de Loire, ONEMA – Université de Rennes I, 2010.
70% à 80 % de la variance de l'Indice Poisson des Rivières ne s'expliquent pas par la présence de seuils sur les cours d'eau.
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.Disentangling dam impacts in river networks (Impacts des barrages sur les cours d’eau), ONEMA-IRSTEA10 Lyon, 2013.
L’étude, publiée dans la revue Ecological indicators, porte sur 17.000 km de rivières et 5.500 seuils ou barrages du bassin hydrographique de la Loire.
Il en ressort que :
- le score IPR n’est que faiblement corrélé à la densité des obstacles : 25 % pour les macroinvertébrés (larves d’insectes, mollusques, crustacés), 12 % pour les poissons.
- les variations de la biodiversité (faune, flore, bactéries) ne correspondent pas à la présence d’obstacles.
Sources :
https://hal.archives-ouvertes.fr/file/index/docid/916423/filename/ly2014-pub00039414.pdf
https://oce2015.wordpress.com/2014/10/17/impact-des-barrages/
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Effects of physico-chemistry, land use and hydromorphology on three river in organism groups : a comparative analysis with monitoring data from Germany and Austria
(Effets physico-chimiques, impact des sols et de l’hydromorphologie sur trois groupes de cours d’eau : une analyse comparative avec suivi des données en Allemagne et en Autriche), Département d’écologie aquatique de l’Université de Duisburg-Essen (Allemagne), Institut d’hydrobiologie et de management des écosystèmes aquatiques de l’Université des sciences et vie de Vienne (Autriche), 2013
L’étude porte sur 2302 sites en Allemagne et en Autriche. L’indice de mesure de la faune piscicole fait apparaître une corrélation faible (moins de 2 %) avec l’hydromorphologie, et deux à trois fois supérieure avec l’état physico-chimique des cours d’eau.
Sources :
http://link.springer.com/article/10.1007/s10750-012-1431-3
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Les politiques d'aménagement doivent être dictées par les réalités financières et le souci d'une juste proportionnalité entre le coût des investissements et leur réel besoin.
Sur ce point, à titre d'exemple, l'arasement total des ouvrages apparait dans l'extrême majorité des cas totalement disproportionné, injustifié et scandaleusement onéreux.
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La suppression des ouvrages des moulins ou les autres mesures radicales d’aménagement proposées, c’est :
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affaiblir le nutritif des espèces aquatiques ;
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enlever de la biodiversité ;
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supprimer des refuges par la disparition du végétal aquatique ;
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ouvrir la porte aux prédateurs des gibiers d’eau en raison du manque d’eau ;
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« lessiver » le lit mineur par des poussées d’eau ;
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Maintenir l’eutrophisation dans les trous (produits azotés et phosphorés) ;
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une augmentation de la température du milieu par l’absence de masse d’eau ;
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la mort d’espèces par le manque d’oxygène dissous ;
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aller vers l’assèchement des fonds de sol pour les terres agricoles en bord de rives ;
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l’affaiblissement ou la disparition des zones humides ;
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s’orienter, en fonction de la nature des fonds de sols, vers une baisse significative accentuer le creusement du bief aval par l’effet « chute d’eau » puisque « l’amortisseur » aura disparu ;
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créer des dynamiques d’érosion des flancs de berges, laissant apparaitre qu’un lit mineur ;
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l’arrêt de certaines activités nautiques et de pêche.
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La sauvegarde de la continuité écologique ne passe pas, ni sur un plan juridique ni sur un plan technique, par la suppression ou l'aménagement radical des ouvrages transversaux et moulins.
3 - Propositions :
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Cesser toute politique obsessionnelle et idéologique de l’abaissement des lignes d’eau, sans fondement juridique, technique et scientifique et qui ne s’avère aucunement dictée par la continuité écologique.
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Cesser ainsi de vouloir abaisser les lignes d’eau et dégrader la situation des nappes et rivières dans un contexte de réchauffement climatique.
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Cesser d’orienter la politique de qualité de l’eau en priorité sur la continuité écologique, cela avant même les paramètres physiques et physicochimiques, alors que l’hydromorphologie n’apparait qu’en 3ème position par la DCE 2000.
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Adopter une politique de l’eau plus courageuse s'attachant, conformément à la DCE de 2000, à traiter en priorité les pollutions et problèmes à la source.
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Organiser une concertation permanente avec les différents acteurs locaux directement intéressés par la politique de l’eau (association de riverains, de propriétaires d’ouvrage ou de moulin, loisirs d’eau, pêcheurs, etc.)
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Réétudier le classement des différentes rivières en liste 2, cela après étude documentée et sur terrain de chacun des ouvrages concernés.
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Réorienter la dépense des millions utilisés à reprofiler les rivières sans gains pour la qualité de l’eau vers l’aménagement de dispositifs le long des terres agricoles empêchant ainsi que les pollutions ne se déversent dans les rivières.
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Financer la recherche de nouvelles pratiques culturales respectueuses de l’environnement et rentables pour les agriculteurs.
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Investir massivement sur l’identification et la réduction du taux de pollution, y compris les polluants médicamenteux.
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Créer des retenues collinaires pour préserver les capacités d’irrigation et favoriser la recharge des nappes phréatiques.
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Cesser de détruire des ouvrages de moulins qui oxygènent l’eau et retiennent certaines pollutions.
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Investir dans les aménagements qui régulent les crues, et préserver les dispositifs hydrauliques installés sur les cours d’eau (seuils) qui permettent de ralentir l’écoulement des eaux.
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Restaurer le fonctionnement hydrologique des moulins, associé depuis des siècles à une faune piscicole abondante, pour préserver les souches de poissons sauvages qui survivent dans quelques tronçons.
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Cesser d’introduire massivement des poissons d’élevage dans les cours d’eau pour des raisons commerciales avec le risque de faire disparaître les souches indigènes.
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Investir massivement dans la lutte contre le changement climatique en favorisant la mise en œuvre de toutes les installations hydrauliques susceptibles de produire de l’énergie électrique renouvelable.